Nous idéalisons trop souvent la vie des personnages bibliques. Nous pensons que ceux qui ont eu le plus de succès, c’était des personnes qui n’ont pas eu les problèmes que nous avons peut-être. 

Examinons le cas de Samuel tout d’abord. Qui serait candidat pour vivre l’enfance de Samuel ? On présente son enfance comme quelque chose à envier mais voilà comment les choses se sont véritablement déroulées : Samuel est né d’un miracle. En effet, un soir de fête, Anne, la mère de Samuel, alors stérile, épanche son cœur à Dieu et lui demande un enfant en lui promettant, si le miracle a lieu, de le lui consacrer.  Et lorsque le miracle a lieu, dans le cours de la même année, Anne tient sa promesse. Alors que Samuel était tout petit et parvenu à l’âge du sevrage, qu’a-t-on fait de lui ? On le conduit, parce qu’il était d’une famille de sacrificateurs, près du souverain sacrificateur, Elie. Il s’est retrouvé dans ce contexte, au milieu des enfants d’Elie, qui étaient des délinquants, des garçons qui ne craignaient pas Dieu du tout. Samuel avait la visite de ses parents une fois par année lors du sacrifice annuel. Ceux-ci profitaient de l’occasion pour lui apporter un vêtement neuf confectionné par sa mère. Voilà dans quelles conditions Samuel a été élevé, sans manifestations régulières d’amour et d’affection de ses parents. Si on était allé consulter un psychologue pour lui, on aurait dit de lui : voilà un garçon qui a beaucoup de carence affective donc il va développer toute sortes de troubles, de difficultés, etc… il n’en a rien été. Son enfance n’a pas été une enfance idéale, il a vécu certainement avec des frustrations, mais il en a été guéri, il les a surmontées, il les a surpassées par la grâce de Dieu qui est certainement passée par là. 

La vie nous confronte à des situations qui ne sont pas parfaites. L’idéal n’est pas de ce monde, encore moins la perfection. Nous avons des frustrations affectives, financières, matérielles, familiales, professionnelles, et spirituelles. Il faut apprendre avec Dieu à gérer cela afin de ne pas sombrer dans l’amertume, le mécontentement chronique qui trop souvent se développe dans notre monde et parfois dans l’Eglise. Le cas de Samuel n’est pas isolé dans la Bible, on peut citer encore Joseph qui, très jeune, fut vendu par ses frères et dû supporter l’absence d’un père qui lui portait tant d’affection. 

Le cas de Samuel et de Joseph, me fait penser à ces enfants déracinés de leurs familles et de leurs racines culturelles dès leur premier âge pour diverses raisons, plus ou moins honorables ou justes, et qui un jour se posent la question du qui suis-je ?

Oui, qui suis-je ? Peut-être vous vous posez cette question aujourd’hui encore. Alors écoutez l’histoire du second personnage qui suit et qui s’appelle Moïse

Moïse a 80 ans lorsqu’il reçoit l’appel de Dieu à partir en Egypte pour délivrer ses frères Hébreux, esclaves de Pharaon. La scène se passe au beau milieu du désert, en face d’un étrange phénomène : un buisson en feu qui ne se consume pas. C’est la première fois que Moïse rencontre Dieu « face à face » et l’entend lui parler. Pas étonnant alors de lire dans le texte biblique la réaction de notre héros qui réplique à Dieu par une objection des plus surprenantes: « qui suis-je ? ». Une autre objection viendra un peu plus tard, comme celle d’avoir la langue embarrassée… Objection que Dieu repoussera en lui répondant qu’il pourra prendre avec lui son frère Aaron, qui parlera alors pour lui…

Au premier abord, dans le contexte de la mission confiée, cette objection « qui suis-je ? », peut laisser apparaître chez Moïse des sentiments d’incapacité et d’incompétence. Moïse est berger depuis quarante années dans le désert, isolé de tout et voilà que Dieu lui donne une position de leader à la tête d’un peuple qu’il a dû quitter rapidement à cause d’un meurtre. Oui, derrière ce « qui suis-je ? » on peut y voir cela, mais je crois qu’il y a autre chose qui se cache derrière. En effet, l’objection de Moïse, pourrait être plus d’ordre psychologique.  

Ah, dans nos milieux évangéliques on est allergique au mot psychologique. Et pourtant, force est de constater que nous sommes des êtres psychologiques. En effet, Dieu nous a créés avec une psychologie, puisque le mot vient de psiché qui signifie « âme ». Donc nous pouvons avoir des problèmes psy. Et je crois que Moïse en a un. On peut même lui donner un nom à son problème : un problème d’identité, c’est-à-dire le fait de ne pas trop savoir qui il est vraiment ; suivez le raisonnement :

Moïse cherche ses racines. Pourquoi ? Parce que son enfance a été des plus « troublées ». Il est né dans des temps très difficiles, où son peuple, les Hébreux, étaient durement éprouvés sous la main de fer de Pharaon. Après avoir été gardé dans la maison de son père un certain temps, il fut déposé au bord du fleuve, parce que ce n’était plus possible de le garder. La vie du bébé était en jeu car Pharaon avait donné l’ordre de jeter dans le Nil tous les enfants mâles qui naissaient afin de limiter la multiplication des esclaves Hébreux. 

Et là, au bord du fleuve, sous la garde de Myriam, Moïse fut recueilli par la fille de pharaon qui l’accueille comme son fils. Ce n’était pas son fils, elle n’était pas sa mère, mais elle le prit comme son fils et la vraie mère du garçon a été prise comme nourrice. 

Voyez la situation : Celle qui est considérée comme votre mère, n’est pas votre mère, et celle qui est prise pour votre nourrice c’est votre mère. Et puis devenu grand, il lui vint à l’idée de libérer ses frères les Hébreux ; certainement que c’est par sa vraie mère qu’il a pris conscience qu’il était un Hébreux, il a donc frappé un Egyptien, l’a tué, et s’est dit comme cela, on va me reconnaître comme un leader, celui que Dieu a appelé comme libérateur. Mais loin de là. Il fut rejeté. Alors pour les Egyptiens, Moïse est Hébreu et pour les Hébreux, on se méfie de lui parce qu’il a été élevé dans la sagesse des Egyptiens. Il est entre deux cultures, entre deux nationalités, deux identités, deux peuples, presque entre le marteau et l’enclume. Qu’est-ce qu’il fait ? Il fuit dans le désert. Et sa fuite dure 40 ans. Il se retrouve dans un pays inconnu qui s’appelle le pays de Madian où il se marie avec « petit oiseau » = Séphora. 40 ans d’exil, de quoi décourager une vocation, de quoi anéantir des projets. Et Dieu arrive pour le chercher et Moïse dit : « qui suis-je ? ». Je ne sais pas qui je suis. Moïse est certainement mal dans sa peau. Beaucoup de gens sont mal dans leur peau pour diverses raisons…

Et dans ce dialogue entre Dieu et Moïse, le remède fut instantané et contenu dans une seule phrase : « celui qui s’appelle je suis, t’envoie ». Il y a là une sorte de miroir entre la question et la réponse : « qui suis-je ?» questionnait Moïse ; « je suis » répond Dieu. L’important ce n’est pas de savoir qui tu es mais que tu saches que moi « je suis ». Il y a là un effet miroir dans lequel l’homme se voit au travers de l’image même de Dieu. Nous devons comprendre que notre véritable identité est par devant nos parents en Dieu, en Jésus-Christ son Fils. Il faut entrer dans le « je suis » de Dieu. C’est une affirmation d’existence et Jésus lui-même a formulé à de nombreuses reprises le « je suis » : le bon berger / le pain de vie / le chemin / la vérité / la vie / la résurrection, etc. 

Notre vraie identité, nous la trouvons en Lui et tant que nous n’aurons pas pris une position en Lui, notre raison d’être sur la terre ne sera jamais résolue. Jésus a dit : « sans moi vous ne pouvez rien faire ». Fort de cela, l’équipe du conseil d’administration de la Villa, sollicite vos prières face au challenge du grand projet qui est en cours.

Frédéric Travier